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Décès de Jean-Pierre Roy

Montréal, le 2 novembre 2014 - L'ancien lanceur et commentateur de baseball Jean-Pierre Roy est décédé vendredi après-midi dans un hôpital de Pompano en Floride où il résidait avec son épouse.

Il souffrait d'un cancer de la prostate, mais selon sa femme Jeanne Roy, c'est sa haute pression et la vieillesse qui l'ont emporté.

Jean-Pierre Roy a visité l'Amérique du Nord et l'Amérique latine grâce au baseball : le Canada évidemment, les États-Unis, le Mexique, Panama, Cuba et la République dominicaine.

Né à Montréal le 26 juin 1920, Roy a commencé à jouer au baseball au Collège de l'Assomption, où il étudiait. À cette époque, son receveur préféré était... Jean Duceppe, qui est devenu l'un des comédiens les plus en vue au Québec.

Le lanceur, lui, n'a pas atteint son plein potentiel à cause de son indiscipline et de son penchant pour la vie nocturne. «Je ne le nie pas, j'aurais dû être plus attentif, mais je n'ai aucun regret», a dit Roy à Ronald King dans La Presse, en juillet 2004.

Il a fait ses débuts dans les rangs professionnels en 1940 avec les Renards de Trois-Rivières, de la Ligue provinciale. Il a goûté au baseball d'hiver en 1943-1944 dans les Caraïbes. Il a été traité comme un roi à Cuba.

À Rochester, en 1944, il a été suspendu, puis rétrogradé pour avoir bu de la bière dans un bar. Il a alors choisi de rentrer à Montréal où il a connu ses meilleurs moments dans les rangs professionnels, en 1945 sous les couleurs des Royaux de Montréal. Il a dominé la Ligue internationale pour les victoires (25) et les retraits sur des prises (139). Il a affiché une moyenne de points mérités de 3,72 et n'a subi que 11 défaites.

«Dans ce temps-là, il n'était pas question de lancer tous les quatre jours ou de compter le nombre de tirs, a rappelé Roy au Soleil de la Floride en avril 2009. Nous étions là lorsque le besoin se faisait sentir. J'ai commencé deux parties dans la même journée. J'en ai gagné une et en ai perdu une. Je lançais en relève aussi. C'était passionnant, je voulais toujours jouer.»

Sa carrière dans les majeures s'est résumée à trois présences au monticule, en 1946, dans l'uniforme des Dodgers de Brooklyn, de la Ligue nationale. Le 5 mai, il s'est montré parfait en relève, retirant les deux frappeurs des Pirates de Pittsburgh, au Forbes Field. Son seul départ est survenu quatre jours plus tard au Crosley Field, contre les Reds de Cincinnati. Il a été sorti en cinquième manche au moment où les Dodgers tiraient de l'arrière 3-0, mais il n'a pas été impliqué dans la décision puisque l'équipe a comblé le déficit. Il a été utilisé en relève le 11 mai au Ebbets Field dans une victoire de 12-11 des Dodgers aux dépens des Phillies de Philadelphie. Au total, il a présenté une fiche de 0-0, concédé cinq coups sûrs, dont deux circuits, et sept points en six manches et un tiers pour une moyenne de points mérités de 9,95.

«Je me suis dit que je réalisais le rêve de ma vie lorsque j'ai revêtu l'uniforme des Dodgers», a confié Roy.

Le rêve a vite pris fin...

En 1946 aussi, il a eu l'honneur de côtoyer Jackie Robinson chez les Royaux. Victimes des railleries racistes du gérant Clay Hopper, Roy et Robinson se sont liés d'amitié. L'année suivante, Robinson est devenu le premier Noir à évoluer dans les majeures, avec les Dodgers.

Roy, lui, a tenté sa chance dans la Ligue du Mexique, malgré la menace de Harry Chandler. Le commissaire du baseball a brandi à tout contrevenant la menace d'exclusion du baseball organisé pour une période de cinq ans.

Roy a fait partie des 18 joueurs honnis, mais l'expérience mexicaine s'est révélée un échec. Il a repris du galon dans la Ligue provinciale, qui était perçu comme un circuit hors-la-loi. Le baseball majeur a finalement levé la suspension, craignant une défaite en cour.

Une deuxième carrière

En 1949, Roy a commencé une «deuxième carrière» tout en gagnant le championnat de la Ligue du Pacifique (AAA), avec les Stars de Hollywood. «C'était le paradis, a dit Roy à la publication française de la Floride. Je ne voulais plus partir de Hollywood : le jet-set, les restaurants, la belle vie. Un soir, dans une boîte de nuit, mes amis m'ont demandé de chanter, parce que je chantais à tout moment. À la fin de mon numéro, le chef d'orchestre m'a demandé si je voulais chanter dans son groupe une fois la saison terminée. Mais une petite surprise m'attendait.

«Le lendemain, mon gérant m'a fait venir à son bureau et m'a dit : "Tu aimes chanter, mon JP? Alors, tu vas aller chanter à Mobile, en Alabama." C'était un coup monté par le gérant qui voulait donner un coup de main à un ami, instructeur là-bas.»

Roy a aussi apprécié ses séjours à Cuba. «Cuba était contrôlé par la mafia américaine. C'était un endroit fascinant... une vie de luxe, les hôtels, les boîtes de nuit, les casinos. Nous n'avons jamais connu de problèmes là-bas. La mafia se faisait très discrète.»

Le beau Brummel pouvait aussi être excentrique sur le terrain. Le 24 juin 1955, il a participé à un «lance-o-thon» à Montréal pendant que les Royaux disputaient un programme double aux Sugar Kings de La Havane. De 11 h à 17 h 45, il a fait 2835 lancers. Des ampoules à la main l'ont contraint à s'arrêter. Jacques Plante, gardien du Canadien, avait agi à titre d'un des receveurs à cette occasion.

Roy a terminé sa carrière à Sherbrooke en 1955.

Son amour de la vie nocturne l'a conduit à Las Vegas où il est demeuré pendant une dizaine d'années. Il y a travaillé comme croupier et agent immobilier.

En 1969, à l'entrée des Expos dans la Ligue nationale, il est revenu au baseball à titre d'analyste des matchs de l'équipe montréalaise. Il a oeuvré à la radio et à la télévision.

Marié cinq fois, il a continué à profiter de la vie malgré deux cancers et un sérieux accident de la route.

Il a vécu les 20 dernières années en Floride, arrivant au bout de son joyeux voyage.

Gaétan Lauzon - La Presse
Photographie : Conrad Poirier / Bibliothèque et Archives nationales du Québec  


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